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Dossier Lumen n° 20

Posté le 24 Septembre 2020

Où en sommes-nous des aides accordées aux personnes handicapées ?

5 ans après le premier numéro de Lumen, l’enjeu majeur demeure bien de rendre effectifs les droits des personnes en situation de handicap. Quelles sont les difficultés rencontrées, quelles avancées et comment passer des droits garantis à des droits effectifs ? De la reconnaissance légale du Handicap au mécanisme d’aides, une traversée dans le temps et un regard porté vers le futur.

Femme devant papiers administratifs

 

 

Décembre 2015, numéro 1 de Lumen : une année qui devait être marquée aussi par la fin des échéances accordées, depuis la loi du 11 février 2005, pour la mise en œuvre de l’accessibilité. Une célébration qui n’a pas eu lieu (loi 2015-988 du 5 août 2015). Un point final à la volonté d’accessibilité ? En tout cas, aujourd’hui le compte n’y est pas et les objectifs ne sont pas (encore) atteints pour circuler librement.

RECONNAISSANCE LÉGALE DU HANDICAP ET AIDES

La reconnaissance du handicap et l’octroi d’aides passent par l’étape incontournable de la MDPH avec le rôle central de la Commission départementale pour l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) pour prendre les décisions. Une démarche qui nécessite un accompagnement pour bien préparer le dossier et éviter certains écueils (voir Lumen #12 p. 12, Lumen #18 p. 10).

” San être pessimiste, j’ai 80 ans et je me demande si je verrai un jour des magasins réellement accessibles” (témoignage dans Lumen #11 p.11)

L’égalité de traitement : pas encore une réalité sur tous les territoires

Depuis la mise en place des MDPH, deux aspects ont été pointés du doigt : d’une part, les délais de traitement, d’autre part l’absence d’harmonisation entre les décisions rendues par les MDPH
(notamment sur le taux d’incapacité).
Pour y remédier :

  • 1/ Des outils ont été créés comme le guide d’appui aux pratiques des MDPH. Leur utilisation marque un progrès, avec cependant des interprétations qui ont fait l’objet de contestation (Lumen #18 p. 10 sur le forfait cécité). Il est donc important que les CDAPH aient connaissance de ces évolutions.
  • 2/ Les délais de traitement sont fixés légalement à 4 mois. Selon le dernier rapport de la CNSA (Rapport CNSA 2019, avril 2020), les délais moyens sont de 4 mois et 3 jours pour les demandes « adultes », 3 mois et 21 jours pour les demandes « enfants». Des délais « moyens» qui ne reflètent pas la diversité des réalités, car ils varient selon les départements et selon les prestations. Aussi, pour un meilleur échange et une harmonisation, une refonte du système d’information des MDPH, intégrant une solution de dépôt en ligne des demandes des usagers, a été engagée depuis 2017. La CNSA mise sur le développement des téléservices. Mais la dématérialisation n’est pas la panacée absolue. Les dossiers sont souvent complexes et il est important de ne pas passer à la trappe le projet de vie (Lumen #1). Et quid de la vie affective, de l’handiparentalité? (Lumen #10, p. 6 à 8). Des sujets qui sont encore trop peu appréhendés.

Ne l’oublions pas : le rôle des MDPH est aussi d’accompagner et de soutenir dans la construction du projet de vie (dossier 31 janvier 2018 — Journée nationale Une réponse accompagnée pour tous : les enjeux de la généralisation, Cnsa).

Un système complexe d’aides

Les personnes déficientes visuelles peuvent bénéficier d’aides dont la nature, le montant, dépendent de l’âge (adulte ou enfant), des besoins, etc. L’appréciation des droits relève des CDAPH pour :

  • la compensation de la perte d’autonomie avec la prestation de compensation du Handicap (aides humaines et forfait cécité, aides techniques [voir Lumen #14 p. 12] — aides animalières [Lumen #19, p. 12, Lumen #4] — ainsi que des aides spécifiques, exceptionnelles, compensation des dépenses liées à la situation d’un enfant en situation de handicap [complément AEEH, par exemple].
  • l’attribution d’un minimum de ressources avec l’allocation adultes handicapés, en fonction du taux d’incapacité, et, le cas échéant de la majoration pour vie autonome [Lumen #17 p. 11].

D’autres aides comme l’allocation journalière de présence parentale, la pension d’invalidité ne sont pas du ressort des CDAPH et ne concernent pas les MDPH [Lumen #12 p. 12].

QUELLES AVANCÉES, QUELLES PERSPECTIVES ?

L’octroi de droits à vie

Cette possibilité, mise en place en début d’année 2019, vise des aides financières, la reconnaissance RQTH et l’attribution des cartes mobilité inclusion pour certains bénéficiaires. Un point positif qui pourrait aussi permettre aux MDPH de se consacrer à d’autres aspects de leurs missions [voir ci-dessus]. La carte mobilité inclusion mention « invalidité» ainsi que l’allocation adulte handicapé sont désormais attribuées sans limitation de durée à toute personne qui présente un taux d’incapacité permanente d’au moins 80 % et dont les limitations d’activité ne sont pas susceptibles d’évolution favorable, compte tenu des données de la science.

L’AEEH de base est, quant à elle, attribuée jusqu’aux 20 ans maximum de l’enfant, dès lors qu’il n’existe pas de perspective d’amélioration.
Et, s’agissant de l’emploi, la qualité de travailleur handicapé est désormais attribuée de façon définitive lorsque le handicap est irréversible.

Par ailleurs, des barrières d’âge visant la PCH ont été levées : elle est accessible sans que soit opposée une limite d’âge dès lors que les personnes y étaient éligibles avant 60 ans [Loi du 6 mars 2020].

Un nouveau numéro national déployé progressivement

Annoncée lors de la 5e conférence nationale du Handicap [11 février 2020] pour 2021, le numéro vert 0 800 360 360 a finalement été utilisé pendant le confinement pour devenir progressivement le point d’entrée unique des personnes en situation de handicap et de leurs proches aidants, sans solution ou ayant besoin d’être accompagnés. Il se déploie sous l’égide de Jérémie Boroy, président du Comité national consultatif des personnes handicapées [CNCPH] avec un esprit de mutualisation, de travail en réseau, pour faire correspondre besoins et réponses. Une avancée, à condition que cela ne soit pas une strate supplémentaire qui s’ajoute et que des clarifications soient apportées sur les missions des MDPH dont le rôle est précisément d’apporter des réponses en cas de difficultés dans le cadre de la démarche Une réponse adaptée pour tous.

Numéro de téléphone national, plateformes d’écoute, pôles d’appui, pôle ressources : il est essentiel que les personnes handicapées, familles, acteurs s’y retrouvent dans ces méandres et que cela débouche sur des solutions concrètes.

LE DÉFENSEUR DES DROITS a dressé récemment un bilan en demi-teinte

Dans le cadre de ses avis, le Défenseur des Droits a régulièrement pointé des manquements sur des cas concernant des personnes en situation de handicap visuel. Citons notamment :

  • Sur l’aménagement et l’organisation des épreuves d’un examen : l’impossibilité pour un candidat de disposer de sujet en braille : Décision 2019-278 du 8 novembre 2019.
  • Sur la possibilité de disposer d’auxiliaire de vie professionnelle et d’aménagement du poste : Décision 2017-292 du 21 novembre 2017 pour un agent travaillant dans une MDPH — Décision MLD 2016-244 du 11 octobre 2016.
  • Sur des faits de discrimination subis lors d’un stage.

Documents disponibles sur

https://www.defenseurdesdroits.fr/

Par Lisiane Fricotté